« Va savoir ce qu’il serait arrivé si je n’avais pas joué », s’interroge
Mason McTavish.
C’est une question bien présente à l’esprit des espoirs admissibles au
repêchage du Canada en cette saison 2020-2021 pour le moins mouvementée.
C’est aussi celle qui a pu habiter McTavish et son coéquipier à l’avant de
l’équipe nationale masculine des moins de 18 ans, Brennan Othmann, dans les
heures, jours et semaines qu’ils ont passés sans hockey, à se demander où
et quand ils pourraient jouer à nouveau.
Ils sont désormais habitués aux nouvelles façons de faire (documents à
remplir, quarantaines et contrôles de la température), mais aussi à être
ensemble. En effet, la saison de la Ligue de hockey de l’Ontario (OHL)
ayant été reportée, puis annulée, les deux espoirs ont été prêtés à l’EHC
d’Olten en Suisse, ce qui leur a permis d’acquérir une précieuse expérience
professionnelle à l’étranger avant le repêchage 2021 de la LNH.
« La saison est longue là-bas, avec la COVID-19 et tous les protocoles,
alors lui et moi, nous sommes un peu habitués à tout ça », rapporte
Othmann.
McTavish et Othmann sont deux des sept joueurs de la formation canadienne
au Championnat mondial des M18 2021 de l’IIHF qui ont pu cumuler de
l’expérience cette saison en s’entraînant et en compétionnant au sein de
clubs européens, en l’absence d’activités au hockey junior majeur canadien.
Les autres sont Connor Bedard (HV71/Suède), Brandt Clarke (HC Nove
Zamky/Slovaquie), Brett Harrison (Koovee Tampere/Finlande), Chase Stillman
(Esbjerg Energy/Danemark) et Francesco Pinelli (HDD Jesenice/Slovénie).
Le sort de l’OHL pesant lourd dans la balance en ces mois où la COVID-19 a
forcé un temps d’arrêt dans le monde du hockey, les démarches entourant la
recherche d’une équipe, la réservation d’un hébergement et l’obtention des
autorisations nécessaires pour voyager à l’étranger en pleine pandémie
mondiale s’inscrivaient dans un contexte chargé d’imprévus.
« À Peterborough, on voulait que les joueurs puissent jouer, alors un prêt
a été consenti, mais il n’a pas été facile de le concrétiser », raconte
McTavish, qui a inscrit 29 buts et 42 points en 59 matchs avec les Petes à
sa saison recrue. « Je devais obtenir un visa de travail et attendre
d’avoir 18 ans. Il y a eu beaucoup de travail en coulisse, mais une fois le
tout réglé, c’était merveilleux. »
Les deux avants, qui ont le même agent, avaient tout prévu en ayant en tête
de jouer ensemble dans la même équipe et de partager un hébergement.
« On se connaissait avant, et il est beaucoup plus facile d’aborder une
nouvelle situation en compagnie de quelqu’un qui parle la même langue que
soi et qui vit la même chose », ajoute McTavish.
Les obstacles à franchir pour se rendre enfin à Olten ont été moins
nombreux pour Othmann, qui est arrivé deux mois plus tôt que McTavish dans
la petite ville située à environ 30 minutes en train de Bâle et de Zurich,
dans le nord de la Suisse.
L’avant des Firebirds de Flint, reconnu pour son excellent tir et sa
polyvalence comme fabricant de jeu et tireur, ne savait pas trop à quoi
s’attendre, sinon que d’avoir l’occasion de vivre au rythme d’un circuit
professionnel pendant quelques mois et d’être actif en cette année où il
devient admissible au repêchage.
« Je suis allé en Europe pour parfaire mes habiletés et améliorer mon jeu
», explique Othmann. « Mon intention n’était pas d’impressionner qui que ce
soit ni d’avoir des statistiques ahurissantes. Je me suis concentré sur
l’amélioration de mon jeu comme le ferait un joueur de hockey
professionnel. Le niveau de jeu était excellent. »
Othmann a pris confiance en son jeu défensif et s’est bien comporté à
l’offensive contre des adversaires plus âgés que lui, inscrivant 8 buts et
18 points en 34 parties en saison régulière et gagnant une bonne expérience
des matchs importants avec le HC de Sierre, qui a balayé la première ronde
de quatre matchs des séries éliminatoires de la ligue suisse. Ces atouts
seront précieux au Mondial des M18 et à son retour dans l’OHL.
« Je n’avais même jamais joué en séries éliminatoires dans l’OHL », relate
Othmann. « Maintenant, j’ai cette expérience professionnelle de la première
ronde, et c’était vraiment excitant d’y jouer. »
Après avoir suivi le processus d’approbation et s’être délié les jambes à
ses premiers matchs à Olten à la suite d’une longue interruption, McTavish
a commencé à mieux mettre à profit son gabarit imposant de 6 pi 2 po et 207
livres. Le jeune de 18 ans s’est en effet montré à la hauteur devant des
rivaux plus âgés que lui, remportant 11 buts et 18 points en 17 parties.
« À mes premiers matchs, il m’a fallu un certain temps pour m’adapter au
fait d’être dans l’action à nouveau », reconnaît-il. « Je n’avais pas joué
depuis neuf mois, mais j’ai trouvé mes repères, et mon jeu s’est amélioré.
Je retrouvais mes réflexes en situation de match. »
Les deux joueurs se sont adaptés à leur nouvelle réalité, si bien que la
décision fut difficile à prendre de revenir en Amérique du Nord et
d’entamer le processus d’évaluation en vue du Championnat mondial des M18
2021 de l’IIHF, à la fin mars, au moment où Olten avançait en demi-finale
des éliminatoires de la ligue suisse.
« On ne penserait jamais vouloir partir au beau milieu des séries
éliminatoires », commente McTavish. « On m’a confirmé qu’on me voulait pour
le Mondial des M18, alors ça a un peu facilité les choses. »
Ce fut un choix difficile, mais nécessaire pour les Canadiens en cette
année déterminante pour leur éventuel repêchage. « Ils m’ont donné une
occasion unique qu’eux seuls pouvaient offrir », ajoute-t-il. « C’était
difficile de partir, mais je pense avoir pris la bonne décision. »
Othmann espère pouvoir récolter les fruits de son séjour prolongé en Europe
en donnant une bonne performance au tournoi, qui pourrait le mener à une
carrière dans la LNH et à une hausse de sa valeur au repêchage cet été.
« Je suis allé en Suisse pour me perfectionner, alors c’est le moment de
redoubler d’intensité et de me mettre en valeur », affirme le joueur
originaire de Pickering, en Ontario.
Les deux jeunes sont toutefois bien conscients de leur chance.
Pour chaque joueur de l’OHL, admissible au repêchage ou non, qui a été en
mesure de se rendre à l’étranger et de disputer des matchs fort
nécessaires, des dizaines d’autres sont restés à la maison, privés de toute
vitrine leur permettant de montrer ce dont ils sont capables en cette
saison mise au rancart.
« C’était triste de voir que nous étions peu nombreux à pouvoir le faire »,
confie Othmann. « Des joueurs de l’OHL n’ont pas pu jouer pendant l’année
où ils deviennent admissibles au repêchage, c’est frustrant. Ces gars-là
ont travaillé fort en vue du repêchage. J’étais l’un des chanceux qui a pu
jouer, mais je suis désolé pour ceux qui n’ont pas pu profiter d’une telle
vitrine. »