Il y a toujours beaucoup d’anticipation en vue de la journée du repêchage.
Pour ceux qui y participent, c’est un passage obligé dans la réalisation de
leur but de jouer dans la Ligue nationale de hockey et une reconnaissance
de nombreuses années consacrées à s’entraîner et à se préparer.
Mais quand ce crescendo est retardé en raison d’un virus qui a interrompu
le hockey pendant des mois, l’attente s’étire au point de devenir
insupportable.
« Je suis vraiment excité », a avoué Jack Quinn, sélectionné huitième au total par les Sabres de Buffalo, avant le repêchage. « Ça fait un bout que j’attends
ce moment. J’ai simplement hâte de vivre cette journée avec ma famille, mes
amis et mes coéquipiers. J'ai hâte que ça aboutisse enfin. »
Si, pour la plupart, la saison 2019-2020 – voire 2020 dans son ensemble –
laisse un goût amer et peut-être même désagréable en bouche en raison des
ravages de la COVID-19 à l’échelle mondiale, Quinn en gardera
potentiellement un souvenir différent.
En fait, ce fut une période charnière marquée par la progression sur le
plan de son développement au hockey.
Avant cette saison, la valeur de Quinn en vue du repêchage était
considérablement moindre. On entendait rarement son nom quand il était
question de la cuvée de 2020, contrairement à d’autres Canadiens tels
qu’Alexis Lafrenière et Quinton Byfield, ou à son coéquipier avec les 67’s
d’Ottawa, Marco Rossi, qui figurent eux aussi parmi les choix les plus
convoités.
Et ce n’est rien de bien étonnant quand on regarde son parcours au hockey.
À l’inverse de la plupart de ceux pressentis comme étant des choix de
première ronde, Quinn n’a jamais fait partie du Programme d’excellence de
Hockey Canada.
Le produit de l’Association de hockey mineur Muskrat a joué au hockey
bantam AA (maintenant la division M15) à l’âge de 13 ans et de 14 ans à
Renfrew, en Ontario, à environ 20 minutes de Cobden, sa ville d’origine.
Ensuite, il a disputé deux saisons, respectivement dans les rangs midget
AAA (M18) et junior A, pour les Lasers de Kanata. C’est lors de cette
deuxième saison, en 2017-2018, qu’il s’est taillé une place au sein de
l’équipe des recrues étoiles de la Ligue de hockey du Canada central
(CCHL), en plus de décrocher les titres de Recrue de l’année et de Meilleur
espoir.
Ces accolades étaient de mise, puisqu’il a continué d’enchaîner les buts et
de s’améliorer tout au long de cette période, comme l’illustrent ses
récoltes de 28 buts et 52 points en 45 matchs dans la division midget AAA
et de 21 buts et 46 points en 49 matchs dans la division junior A.
Au cours de sa saison avec les Lasers dans la CCHL, les 67’s – qui avaient
sélectionné Quinn en deuxième ronde de la sélection prioritaire 2017 de la
Ligue de hockey de l’Ontario (OHL) – lui ont accordé une audition de huit
matchs qui lui a permis d’obtenir un poste à temps plein avec l’équipe en
2018-2019.
C’est ce parcours somme toute sans éclat qui a mené Quinn au hockey junior
majeur et à sa position actuelle sur la liste des meilleurs espoirs de tous
les services de repêchage notoires de la LNH.
« J’ai pensé que j’aurais pu avoir la chance de jouer pour Hockey Canada en
cours de route », a raconté Quinn. « Mais ça ne s’est pas concrétisé, et
j’étais à l’aise avec ce dénouement. En fin de compte, le fait de passer
inaperçu et d’avoir à me prouver a tout aussi bien fonctionné. »
À sa première saison complète dans l’OHL, Quinn a inscrit 12 buts et 32
points en 61 matchs au sein d’une équipe des 67’s qui a obtenu la meilleure
fiche en saison régulière – des statistiques ordinaires, il va sans dire.
Mais étant né le 19 septembre 2001, quatre jours après la date limite pour
le repêchage 2019 de la LNH, Quinn n’allait être admissible qu’en 2020. Il
a donc sagement profité de cette année supplémentaire pour poursuivre sa
progression vers le statut de joueur élite.
« Ça m’a beaucoup aidé », a-t-il admis. « J’ai vu le tout plutôt comme une
opportunité et un avantage. Je savais que je devais connaître une grosse
année. Je pense que je me suis fixé des objectifs élevés. J’ai eu une
excellente année au cours de laquelle j’ai continué de m’améliorer. »
Il dit vrai. Quinn a connu une première campagne incroyable, et sa saison
n’a donné nul autre choix aux dépisteurs que de faire grimper son nom au
classement des espoirs, surtout pendant la portion 2020.
Durant sa saison, il a marqué 52 buts et produit à un rythme supérieur à un
point par match – soit 89 points en 62 matchs.
Toutefois, aux yeux de Quinn, sa transition de son statut de joueur
admissible au repêchage parmi tant d’autres à celui de choix de première
ronde s’est amorcée à l’été 2019, sous la gouverne de l’entraîneur-chef
d’Ottawa, André Tourigny.
Outre son poste derrière le banc des 67’s, Tourigny était l’un des adjoints
de la formation médaillée d’or du Canada au Championnat mondial junior 2020
de l’IIHF l’hiver dernier et il a été nommé entraîneur-chef pour l’édition
2021.
Un point à améliorer sur lequel Tourigny a insisté auprès de Quinn était la
nécessité d’attaquer le centre de la glace pour acheminer la rondelle au
filet et augmenter son pourcentage de tirs.
Ça a fonctionné.
« Dès le camp d’entraînement, j’étais un joueur transformé », a dit Quinn.
« Mon travail en saison morte y était pour beaucoup. Converger vers
l’intérieur et devenir plus dur à affronter étaient mes objectifs, et André
a été très bon pour me talonner dans mes efforts. Après quelques mois
pendant la saison, j’ai senti que j’ai vraiment pris mon erre d’aller et je
me suis constamment amélioré par la suite. »
« Pour moi, c’était une question d’état d’esprit. Je ne me rendais pas
vraiment compte que je ne faisais pas ces choses-là. Après ces ajustements,
j’ai remarqué que j’obtenais beaucoup plus de chances de marquer. »
Ce n’est pas seulement Quinn qui a remarqué le changement. Les dépisteurs
l’ont vu également.
Dans deux rapports de match différents pour Elite Prospects, un service de
dépistage international qui pressentait Quinn comme un choix à mi-chemin de
la première ronde, la dépisteuse de l’OHL Rachel Doerrie a écrit ce qui
suit :
« On aurait dit que la rondelle le suivait ce soir, que ce soit dans ses
batailles gagnées le long des bandes, ses attaques au centre ou sa présence
devant le filet. »
« Il a eu un impact positif sur le match à chacune de ses présences,
offensivement et défensivement. Sa performance d’aujourd’hui me prouve que
Quinn peut être choisi à mi-chemin de la première ronde. »
À l’amorce de la semaine du repêchage, tous les services de dépistages qui
ont fait des projections prévoyaient une sélection en première ronde pour
Quinn, y compris le Bureau central de dépistage de la LNH, qui lui a
réservé le septième échelon au total parmi les patineurs nord-américains.
Dans les moments qui ont précédé le grand jour, le joueur de six pieds et
175 livres a eu des discussions avec une longue liste d’équipes de la LNH,
à plusieurs reprises dans certains cas.
Quinn a soutenu que la fréquence des communications avec certaines équipes
ne voulait rien dire en soi, mais il sait désormais qu’il entamera sa
carrière professionnelle avec l’organisation des Sabres.
Et il ne fait aucun doute qu’il sera prêt.