Il aura fallu de la force et du courage, et ce fut tout sauf simple.
Dans la vie, les choses les plus difficiles, et celles qui mènent aux plus
belles récompenses, sont généralement celles qui sont les plus exigeantes à
faire.
Mélodie Daoust savait depuis un certain temps qu’elle était en amour avec
son amie de longue date Audrey St-Germain. Mais il lui a fallu de la force
et du courage, ainsi que du temps, pour pouvoir l’admettre ouvertement.
« Au début, je n’étais pas certaine ou j’avais peur des réactions, surtout
de celles de ma famille et de mes amis », raconte la joueuse de 28 ans qui
a gagné une médaille d’or olympique avec l’équipe nationale féminine du
Canada en 2014. « J’ai gardé le secret pendant environ trois ans avant de
décider de m’affirmer et d’être capable de m’accepter. »
« Je l’ai d’abord annoncé aux membres de ma famille, qui ont respecté ma
réalité, tout en ayant besoin de temps pour s’y faire. Comme moi, ils
devaient digérer le tout, mais ils se sont vite rendu compte que j’étais
toujours la même personne. Quant à mes amis, ils m’ont dit que je pouvais
faire ce que je voulais tant que ça me rendait heureuse. Ça m’a beaucoup
facilité la vie. Je n’ai jamais eu à traverser des moments difficiles avec
ma famille et mes amis, donc c’était super pour moi. »
C’était en 2013. Daoust dit que le dévoilement de son orientation sexuelle
lui a donné l’impression qu’un immense poids était retiré de ses épaules.
Elle pouvait enfin être elle-même en compagnie de sa famille et de ses amis
sans avoir à se cacher.
Daoust et St-Germain se connaissent depuis très longtemps. Elles se sont
rencontrées à l’âge de 10 ans à un camp estival de hockey et ont ensuite
foulé la même glace ensemble à différentes occasions au fil des années
suivantes. Même si elles ont pris des chemins différents à l’adolescence,
Daoust et St-Germain ont fini par se retrouver. Leur relation a grandi,
elles sont tombées en amour et se sont mariées en août 2019. Elles ont
également accueilli la naissance de leur fils Mathéo en mai 2018.
« C’est incroyable. Il nous rend très heureuses, c’est sûr », affirme
Daoust. « Son arrivée dans nos vies nous a comblées au plus haut point. Il
est débordant d’énergie, très gentil et respectueux. Il veut jouer à de
nouveaux jeux tous les jours. Il est en train d’apprendre à parler. Je lui
montre l’anglais, et ma partenaire lui enseigne le français. Nous essayons
de l’élever et de lui apprendre le respect de la meilleure façon possible.
On espère qu’il deviendra un jeune garçon fort et respectueux. »
Daoust sait bien que son style de vie n’est pas accepté de tous. Elle se
considère tout de même chanceuse – le hockey a toujours été un milieu
accueillant. Daoust s’est jointe au programme de Hockey Canada au sein de
l’équipe nationale féminine des moins de 18 ans du Canada en 2009 et dit ne
pas avoir été victime d’intolérance.
Comme jeune joueuse, elle a vu des vétérantes à l’aise de dévoiler leur
orientation sexuelle, ce qui lui a permis de gagner en confiance quant à
son identité. Selon elle, le programme appuie tout le monde, sans égard à
la race, au genre ou à l’orientation sexuelle.
« J’ai l’impression que c’est discuté ouvertement par tous dans le monde du
hockey, ce qui aide vraiment tout le monde à se sentir accueilli et accepté
», estime Daoust. « Nous savons que Hockey Canada nous appuie et soutient
chaque joueuse, peu importe sa nationalité, la couleur de sa peau ou la
personne avec qui elle partage sa vie personnelle. Ça rend le tout beaucoup
plus facile pour être soi-même et faire preuve d’ouverture par rapport à
tout ça. Tous les entraîneurs dans l’organisation connaissent les joueuses
et leur vie si elles choisissent d’en parler, et rien ne les rend plus
heureux que de les savoir heureuses. »
Gina Kingsbury est la directrice des équipes nationales féminines de Hockey
Canada. Elle est également une ancienne joueuse qui a disputé 116 matchs au
sein de l’équipe nationale féminine du Canada pendant sa carrière, au cours
de laquelle elle a gagné deux médailles d’or olympiques et deux titres
mondiaux.
Actuellement, Kingsbury détient l’un des postes les plus importants au
hockey féminin. En plus de veiller à ce que les équipes du programme soient
les plus performantes possible sur la glace et à ce que le hockey féminin
croisse d’un océan à l’autre à l’autre, elle s’assure que toutes les
athlètes sont en mesure d’évoluer, de s’entraîner et de grandir dans un
milieu accueillant et inclusif.
Âgée de 38 ans, Kingsbury soutient que Hockey Canada développe une culture
d’inclusion depuis de nombreuses années, que l’organisation tâche de
prendre des mesures concrètes.
« C’est une culture qui s’est bâtie au fil de nombreuses années. Je crois
que ce n’est rien de nouveau pour nous », estime Kingsbury. « Ça fait
partie de qui nous sommes et c’est grâce aux personnes extraordinaires qui
font partie de notre programme. Nous nous assurons de créer un milieu
inclusif qui permet aux personnes d’être elles-mêmes et de se sentir
acceptées, et je suis d’avis que le fait de se sentir en sécurité dans ce
milieu favorise le succès. Ça nous permet non seulement d’être proches au
sein de l’équipe et du programme, mais aussi d’avoir du succès dans ce
qu’on fait. Ça montre aussi que nous donnons l’exemple mondialement à ce
titre depuis de nombreuses années. »
Juin est le Mois de la Fierté au Canada, où on célèbre la communauté
LGBTQ2+, qui comprend lesbiennes, gais, bisexuels, transgenres,
allosexuels, bispirituels ainsi que d’autres genres et identités sexuelles.
Par le passé, les athlètes de Hockey Canada, y compris celles du programme
féminin, ont participé aux défilés de la Fierté partout au pays. Même si la
COVID-19 a contraint les organisateurs à annuler les défilés prévus à
travers le Canada, Kingsbury est convaincue que certaines de ses athlètes
trouveront d’autres manières de montrer leur appui.
Entretemps, Daoust se prépare à diriger des camps virtuels pendant deux
semaines et a très hâte de sauter à nouveau sur la glace. Elle a tout de
même apprécié son temps à domicile, où elle s’est entraînée dans un espace
qu’elle a aménagé dans son garage et a profité de la présence de St-Germain
et de Mathéo.
Daoust est reconnaissante envers sa famille et ses amis pour le soutien
qu’ils lui ont apporté et qu’ils continuent de lui offrir. Et bien qu’elle
ne se considère pas comme un modèle ni comme quelqu’un qui étale sa vie
personnelle au grand jour, elle est consciente que ses efforts dans
l’affirmation de son orientation sexuelle pourraient être bénéfiques pour
d’autres personnes.
« Je pense que si je peux aider quelqu’un dans son parcours pour s’ouvrir à
ce sujet, c’est quelque chose qui me rendra heureuse », affirme-t-elle. «
Je suis d’avis que l’amour est aveugle, il suffit d’écouter son cœur. C’est
tout ce qui compte. Si tu es heureuse, les personnes autour de toi le
seront aussi. »