10 aout, 2012
Selon les « experts » canadiens, c’était une série qui n’était pas supposée en être vraiment
une. Bien que l’Union soviétique venait de remporter les neuf derniers championnats mondiaux, de 19,
face à des clubs amateurs, les Soviétiques n’auraient aucune chance face aux meilleurs joueurs canadiens de
la LNH, dans le cadre de la Série du siècle de 1972.
Et lorsque Phil Esposito et Paul Henderson ont marqué au cours des six premières minutes du premier match,
au Forum de Montréal, les Canadiens semblaient bien en voie de faire ce qui était prévu, c’est-à-dire balayer
la série de huit matchs.
Toutefois, les Soviétiques ont créé l’égalité avant la fin du premier tiers et compté les deux seuls buts
de la période médiane pour prendre une avance de 4-2 après 40 minutes. Bobby Clarke a creusé l’écart à un but
en troisième période, mais trois buts sans réplique des Soviétiques ont mis la touche finale à une victoire
de 7-3, ce qui a bouleversé le monde du hockey au Canada, d’un océan à l’autre.
Le Canada a égalisé la série avec une victoire de 4-1 à Toronto lors du match no 2, mais un match nul de
4-4 à Winnipeg et un revers de 5-3 à Vancouver placeront les Canadiens en retard 1-2-1 dans la série, avant
de s’envoler vers Moscou pour les quatre derniers affrontements.
Après le match à Vancouver, les partisans d’Équipe Canada ont hué les membres de l’équipe, ce qui a poussé
Esposito a livré un discours émotif à la télévision nationale, qui a été considéré comme l’un des tournants
de la série :
« À tous les gens au Canada, je veux dire que nous avons essayé, nous avons donné notre meilleur et à
tous ceux qui nous huent, tous les joueurs ici sont découragés et désillusionnés. Nous sommes déçus de
certaines personnes. Nous n’en revenons pas du mauvais portrait qu’on a dressé de nous dans les médias,
d’être hués dans notre propre aréna… Je suis vraiment, vraiment, vraiment déçu. Complètement déçu. Je ne peux
y croire. Certains de nos joueurs sont vraiment tristes, nous savons que nous avons tout essayé. Je veux
dire, nous faisons de notre mieux et ils forment une bonne équipe, il faut l’avouer. Mais ça ne veut pas dire
que nous ne donnons pas notre 150 %, parce que c’est vraiment ce que nous faisons. Je ne pense pas que
nous méritons d’être hués. »
Un revers de 5-4 au match no 5, au cours duquel le Canada menait 3-0 après deux périodes et 4-1 à
mi-chemin au troisième tiers, obligeait les Canadiens à remporter trois matchs de suite pour éviter un échec
inattendu au terme de cette série.
La remontée s’est amorcée avec un gain de 3-2 dans la sixième partie. Henderson a inscrit le but
victorieux à 6:36 du deuxième tiers. La formation canadienne a ensuite égalisé la série en remportant le 7e
duel 4-3, grâce à un autre but gagnant de Henderson, cette fois avec seulement 2:06 à écouler.
Les victoires consécutives ont mis la table pour le huitième match, le . Alors que le
match avait lieu en plein milieu de la journée au Canada, la majorité des gens au pays ont cessé leurs
activités pour regarder la partie, notamment dans les écoles et les bureaux. Ce jour-là, le hockey était
la seule préoccupation.
Une première période pleine de rebondissements a permis aux Soviétiques de prendre deux fois une avance
d’un but pour voir le Canada rebondir à deux reprises, grâce à des buts d’Esposito et de Brad Park. Une
avance d’un but des Soviétiques en début de deuxième tiers a été annulée à la suite d’un filet de Bill White,
mais un doublé des Soviétiques en l’espace de cinq minutes plaçait les Canadiens en retard 5-3 après 40
minutes de jeu.
Le deuxième du match d’Esposito a permis au Canada d’amorcer une remontée à 2:27 et Yvan Cournoyer a remis
les pendules à l’heure à 12:56, mettant la table pour toute une fin de match.
Si les Soviétiques parvenaient à maintenir l’égalité, ils remportaient la série grâce à une avance de
32-31 au chapitre des buts pour. Toutefois, Henderson s’est assuré que ce ne soit pas nécessaire, comptant
l’un des plus grands buts de l’histoire du hockey canadien, avec seulement 34 secondes à jouer, son troisième
but victorieux en autant de matchs.
« Le tir au but! Henderson fait tout ce qu’il peut pour s’emparer du disque mais tombe. Un autre tir,
directement devant le filet, et c’est le but! Henderson vient de marquer pour le Canada! », ont été les
paroles mémorables de Foster Hewitt, décrivant sans aucun doute le moment le plus magique de l’histoire des
sports canadiens. Ceci a couronné une série épique et lancé ce qui demeure aujourd’hui, 40 ans plus tard, la
plus grande rivalité du hockey international.
Le Défi Canada-Russie n’est pas seulement un hommage au 40e anniversaire de la Série du siècle de 1972; il
s’agit aussi d’une activité de financement. Une partie du produit des matchs tenus à Yaroslavl sera versée
aux familles des victimes de la tragédie aérienne qui a décimé le Lokomotiv. Le Canada et la Russie se sont
livré des luttes mémorables sur la glace, mais le hockey et l’humain ne font qu’un en présence d’une
tragédie.