Sur la glace, l’équipe nationale féminine des moins de 18 ans du Canada a
balayé ses trois matchs contre les États-Unis pour la première fois depuis
2007 dans le cadre de sa série estivale. Mais derrière le banc, une autre
page d’histoire a été écrite grâce au personnel d’entraîneuses.
L’entraîneuse-chef Courtney Birchard-Kessel et ses adjointes Stefanie
McKeough et Tara Watchorn ont formé la première équipe d’entraîneuses
entièrement féminine de l’histoire du programme féminin des M18 du Canada.
Sans négliger l’importance de la performance contre les Américaines, il
reste que l’impact de la série sur l’essor du hockey féminin va bien
au-delà de la patinoire.
« Il y a un bel élan en ce moment pour les femmes qui s’impliquent dans
l’entraînement, soutient Watchorn. Grâce à des pionnières comme Hayley
Wickenheiser et Caroline Ouellette, on a le plaisir de voir des femmes qui
s’investissent comme entraîneuses, et c’est maintenant possible d’en faire
une carrière, alors que c’était extrêmement difficile d’y parvenir
auparavant. J’aime vraiment voir cette transition où une génération de
joueuses qui ont fait carrière au hockey peut maintenant aspirer à
décrocher un poste en entraînement. »
S’ajoute à cette réalisation le fait que les trois membres du personnel
d’entraîneuses sont des anciennes du programme national féminin qui ont
foulé la glace ensemble lors de différents camps et événements au fil des
15 dernières années. Elles ont notamment goûté à l’or avec l’équipe
nationale féminine de développement du Canada à la Coupe MLP 2011, le seul
événement où elles ont représenté leur pays au sein d’une même équipe.
Ensemble, les trois ont un bagage de 183 matchs sur la scène
internationale. Birchard-Kessel a pris part à trois éditions du Championnat
mondial féminin de l’IIHF, gagnant l’or en 2012, Watchorn est devenue une
médaillée d’or olympique en 2014, en plus de participer trois fois au
Mondial féminin, et McKeough faisait partie de la formation canadienne au
Championnat mondial féminin des M18 2009 de l’IIHF.
Ces retrouvailles derrière le banc pour le programme national revêtent
ainsi une couleur particulière pour les trois hockeyeuses.
« Nos trois parcours se sont croisés tellement souvent pendant nos
carrières de joueuses, et nous avons beaucoup d’expériences et de valeurs
apprises en cours de route que nous partageons, raconte Watchorn. Dans le
cas des M18, elles sont plutôt jeunes et, pour bon nombre d’entre elles, il
s’agit d’une initiation au milieu de la haute performance. Donc, on est en
mesure de comprendre ces sources d’anxiété et d’en tenir compte. On leur
dit de simplement se concentrer sur l’instant présent et de profiter du
temps qu’elles passent avec leurs coéquipières, car ça ne fait que les
rendre meilleures. »
Watchorn a toujours voulu être entraîneuse. Déjà, au cours de son illustre
carrière de joueuse, marquée par les Jeux olympiques, le Mondial féminin et
une conquête de la coupe Clarkson avec les Blades de Boston dans la LCHF en
2015, Watchorn savait qu’elle souhaitait transmettre ses expériences
positives vécues au hockey.
« Je suis tellement chanceuse d’avoir pu m’imprégner de cultures et
m’inspirer d’équipes qui ont véritablement changé ma vie », affirme
l’entraîneuse native de Newcastle, en Ontario, qui est la toute première
pilote du programme féminin au Collège Stonehill, « et je souhaite donc
recréer de tels environnements et de telles cultures pour d’autres jeunes
femmes qui peuvent cheminer, être inspirées, repousser leurs limites et
devenir des meneuses capables de faire leur marque. »
Jouer au hockey ne mène pas forcément à un parcours en entraînement, mais
c’est une transition qui finit parfois par s’opérer à force de baigner dans
le milieu. Après avoir accroché ses patins à la suite d’une carrière
collégiale de cinq ans à l’Université du Wisconsin (où elle a remporté le
titre national de la NCAA en 2011), McKeough ne s’attendait aucunement à ce
que ce soit l’entraînement qui finisse par occuper ses temps libres.
Mais son parcours de joueuse l’a menée en Suède, où elle a eu la piqûre
après avoir été initiée à ce travail. À ce jour, McKeough se dit encore
surprise de se présenter à l’aréna à titre d’entraîneuse à temps plein.
« Les joueuses de hockey sont d’abord et avant tout des humains, explique
la native de Carlsbad Springs, en Ontario. J’ai appris grâce à
l’entraînement qu’il faut d’abord aider la personne avant d’aider la
joueuse, et le fait de pouvoir soutenir les autres est un aspect qui me
motive chaque jour à l’aréna. »
Entraîneuse adjointe à l’Université d’Ottawa, McKeough a l’occasion
d’apprendre d’entraîneuses vétéranes d’U SPORTS comme Vicky Sunohara
(Toronto), Rachel Flanagan (Guelph) et Chelsea Grills, l’entraîneuse-chef
des Gee-Gees, des femmes qu’elle côtoie au quotidien dans le cadre de son
travail. Elles ont servi d’exemples à McKeough d’abord pendant qu’elle
était joueuse, puis maintenant dans son rôle d’entraîneuse.
« En fait, Vicky a été l’une de mes entraîneuses à mon premier camp des
M18, et Rachel était entraîneuse adjointe lors de l’une de mes années au
sein de l’équipe des moins de 22 ans. Maintenant que je travaille à leurs
côtés, je suis à même d’apprécier encore plus ce qu’elles accomplissent
comme entraîneuses.
« En ayant des modèles bien réels, j’ai pu continuer à développer ces liens
avec d’autres entraîneuses et les joueuses. »
La croissance et la visibilité des femmes en entraînement et dans des
postes de leadership ne font que prendre de l’ampleur. Pas plus tard que
cet été, l’ancienne de Hockey Canada Jessica Campbell a été embauchée à
titre d’entraîneuse adjointe par les Firebirds de Coachella Valley dans
l’AHL, Laura Fortino, qui a connu une longue carrière de défenseure avec
l’équipe nationale, a obtenu le même rôle pour les Bulldogs de Hamilton
dans l’OHL, et les médaillées d’or olympiques de 2022 Marie-Philip Poulin
et Rebecca Johnston ont accepté des postes de développement des joueurs
respectivement avec les Canadiens de Montréal et les Flames de Calgary.
« Un leadership diversifié n’a pas de prix, soutient Watchorn. C’est
essentiel de pouvoir profiter des différents bagages de chacun et tisser
des liens avec les joueuses. Ça prend des modèles bien réels. »