Il est sans contredit l’athlète le plus reconnu au Canada; le plus grand nom du plus grand sport au
pays.
Mais avec tout ce que Sidney Crosby a accompli au cours des dix dernières années, de l’or au mondial
junior à la coupe Stanley et à l’or olympique, il est difficile de croire qu’il y a 10 ans à peine il a volé
la vedette à la Coupe Air Canada 2002 alors qu’il n’était qu’une jeune de 14 ans aux cheveux décolorés.
Crosby n’était pas un inconnu lorsqu’il s’est présenté au championnat national midget – il avait cumulé 95
buts et 98 aides pour 193 points en 74 matchs avec les Subways de Dartmouth, et ses talents de marqueur
avaient été jugés dignes de mention lors de l’émission de télévision annuelle Hockey Day in Canada.
Alors que plusieurs le décrivaient déjà comme « le prochain », les attentes à son égard étaient
élevées à Miramichi au Nouveau-Brunswick et il n’a certes pas déçu.
Contre quelques-uns des meilleurs joueurs au pays, dont la plupart avaient deux ou trois ans de plus que
lui, Crosby a cumulé 24 points (11 buts, 13 aides) en sept matchs, aidant les Subways à devenir la première
équipe de la région atlantique des 29 ans d’histoire du tournoi à accéder au match pour la médaille d’or.
« Ce n’était pas seulement qu’il marquait des buts », se souvient l’avant Andrew Gordon des
Wolves de Chicago (AHL), un coéquipier de trio de Crosby au tournoi. « Il dominait le jeu d’une façon
autre que les autres joueurs de talent; il abordait le jeu différemment. Il ne fait aucun doute qu’il a été
la différence pour nous cette année-là. »
Gordon n’était pas mal lui non plus; prenant part à sa deuxième Coupe Air Canada consécutive, le futur
choix au repêchage des Capitals de Washington (2004, 7e ronde, 197e au total) a cumulé 20 points (six buts,
14 aides) au sein du même trio que Crosby.
« Ce nombre peut être trompeur », affirme Gordon en riant. « Quelques-unes de mes aides
sont survenues à la suite de la sortie de zone; je tirais la rondelle hors de la zone, Sid allait la
récupérer, il déjouait quelques gars et marquait et moi, j’obtenais la mention d’aide. »
Voici une analyse, match par match, de la façon dont Crosby a fait de la Coupe Air Canada 2002 son propre
terrain de jeu :
Match 1 –
Subways de Dartmouth 8, Rivermen de Miramichi 2
Buts : 2 | Aides : 3 | Points : 5
Crosby n’a pas perdu de temps avant d’inscrire son nom sur la feuille de pointage, préparant le but de
Gordon pendant une supériorité numérique au milieu du premier tiers avant de marquer son premier du tournoi
en fin de première période, aidant Dartmouth à prendre les devants 3 -0. Il a obtenu deux autres
mentions d’aides sur les deuxième et troisième buts de Gordon en deuxième période avant d’inscrire le dernier
but des siens, son deuxième du match et son cinquième point, en troisième dans la victoire écrasante de
Dartmouth sur les hôtes du tournoi.
Match 2 –
Subways de Dartmouth 3, Riverains du Collège Charles-Lemoyne 3
But : 1 | Aides : 2 | Points : 3
Tirant de l’arrière 1 -0 au début de la deuxième période, Crosby et Gordon ont préparé le but de Sean
Flinn qui a nivelé la marque à la 18e seconde. Puis le but de Crosby 12 minutes plus tard donnait une
première avance aux Subways. Après que les champions du Québec eurent créé l’égalité au cours de la première
minute du troisième tiers, Crosby et Gordon ont de nouveau travaillé ensemble, Crosby obtenant une mention
d’aide sur le but de Gordon avec 5 min 30 s à jouer. Malheureusement pour les Subways, le Collège
Charles-Lemoyne a de nouveau nivelé la marque à 17:36. Cependant, Dartmouth est devenue la première équipe de
l’Atlantique à ne subir aucune défaite au cours de ses deux premiers matchs au tournoi depuis que celui-ci
avait adopté une structure avec six équipes en 1984.
Match 3 –
Chiefs de Red Deer 8, Subways de Dartmouth 6
Buts : 3 | Aides : 3 | Points : 6
La première période contre les Chiefs a sans aucun doute donné lieu à la plus impressionnante performance
de Crosby au tournoi. Il a réussi un tour du chapeau naturel en 8 min 5 s et ajouté deux mentions d’aide
avant que la sonnerie marque la fin du premier tiers. Les Subways jouissaient alors d’une avance de 5 -0 qui
semblait insurmontable. Mais les Chiefs ont marqué les sept prochains buts et, alors que Crosby cumulait sa
plus grande production offensive du tournoi en obtenant une mention d’aide en troisième période, les Subways
étaient en voie de subir leur première défaite.
Match 4 –
Subways de Dartmouth 5, Majors de Timmins 4
Buts : 2 | Aides : 2 | Points : 4
Avec une place en demi-finale en jeu, les Subways tiraient de l’arrière 4 -2 après 40 minutes de jeu
et Crosby n’avait marqué aucun but au cours des deux premières périodes pour la première fois du tournoi bien
qu’il avait obtenu une mention d’aide sur les deux buts de Dartmouth. Prenant l’équipe sur ses épaules,
Crosby a mené les Subways à un but de l’égalité à la 22e seconde du dernier tiers puis, après que Matt Oxtoby
eut nivelé la marque peu après la 12e minute, il a marqué le but gagnant alors qu’il restait moins de quatre
minutes au match pour permettre à Dartmouth d’accéder au carré d’as.
Match 5 –
Trojans de Tisdale 5, Subways de Dartmouth 1
But : 0 | Aide : 0 | Point : 0
Déjà assurés de prendre part aux demi-finales, les Subways ont été écrasés par les Trojans à leur dernier
match de la ronde préliminaire au cours duquel ils ont été dominés 55-21 au chapitre des tirs au but. Crosby
a été tenu à l’écart de la feuille de pointage pour la seule fois du tournoi et une des rares fois au cours
de la saison. Il a néanmoins été nommé le joueur par excellence et le meilleur pointeur de la Coupe Air
Canada au banquet de remise des prix ce soir-là. Au total, Crosby avait participé à 18 des 23 buts de
Dartmouth en ronde préliminaire (8 B, 10 A).
Match 6 – (demi-finale)
Subways de Dartmouth 5, Chiefs de Red Deer 4
Buts : 2 | Aides : 2 | Points : 4
Tirant de l’arrière 2 -1 après une période et 4 -3 après deux contre les Chiefs qui occupaient le
sommet du classement, Dartmouth s’est à nouveau tournée vers son jeune joueur étoile. Ayant déjà inscrit un
but et obtenu une mention d’aide au cours des 40 premières minutes de jeu, Crosby a préparé le but du
capitaine des Subways, Jeff Kielbratowski, pour créer l’égalité au début de la troisième période et alors que
la prolongation pointait à l’horizon, il a profité d’un rebond chanceux lorsqu’un tir de Flinn l’a frappé sur
la poitrine avant de dévier dans le but derrière le gardien de Red Deer, Brandon Heatherington, alors qu’il
restait 32 secondes à jouer. Dartmouth serait donc du match pour la médaille d’or.
Match 7 – (match pour la médaille d’or)
Trojans de Tisdale 6, Subways de Dartmouth 2
But : 1 | Aide : 1 | Points : 2
Les douze coups de minuit ont sonné pour le parcours Cendrillon des Subways. Les Trojans ont pris les
devants 4 -0 et tenu Crosby et Dartmouth à l’écart de la feuille de pointage jusqu’à la fin du deuxième
tiers. Crosby a ensuite participé aux deux buts des Subways, marquant une fois et obtenant une aide sur
l’autre, mais la défensive de Tisdale, avec l’aide des futurs défenseurs de la LNH, Shaun Heshka et Tyson
Strachan, a freiné l’offensive de Dartmouth qui n’a obtenu que 17 tirs au but, sa plus faible production du
tournoi.
« Il n’avait que 14 ans à l’époque et il a été le meilleur pointeur du tournoi », a déclaré
l’avant de Tisdale, Brett Parker, au Saskatoon StarPhoenix en 2008. « J’ai essayé de le frustrer pendant
tout le match. Je me souviens même de lui avoir demandé : “Pour qui te prends-tu, Wayne Gretzky ou
quelqu’un du genre?” Évidemment, quatre mois plus tard, Wayne Gretzky a déclaré qu’il (Crosby) était le
prochain Wayne Gretzky. C’était comme une gifle en plein visage. »
Pour Crosby, la Coupe Air Canada 2002 n’aura été qu’une étape parmi tant d’autres – un peu plus d’un an
plus tard, il était le meilleur joueur junior au Canada alors qu’il évoluait avec l’Océanic de Rimouski, et
trois ans plus tard, il enfilait le chandail des Penguins de Pittsburgh en tant que premier choix au
repêchage universel de la LNH.
Depuis, il n’a cessé d’accumuler les exploits, remportant la coupe Stanley avec les Penguins en 2009 et
une médaille d’or olympique à Vancouver en 2010 où il a signé le moment clé des Jeux en marquant le but
gagnant en prolongation lors du match pour la médaille d’or. Mais pour plusieurs de ceux qui ont joué avec et
contre lui à Miramichi, le championnat national midget demeure un souvenir intarissable.
« Ce furent vraiment les derniers jours où nous avons joué par pur amour pour le sport », a dit
Gordon. « Nous ne jouions pas pour les dépisteurs ou pour être repêchés; notre père nous conduisait à
l’aréna et nous jouions pour le plaisir de jouer. Et cette année-là, avec cette équipe-là… ce fut très
amusant. »